Amélie Lériget-Ouali — Diététicienne Nutritionniste | Téléconsultation

Beaucoup de personnes essaient de “dompter” leur faim, de la contrôler, voire de la faire taire. Pourtant, la faim n’est pas un ennemi : c’est un signal précieux, une boussole interne qui nous aide à manger de façon juste et équilibrée.

Si vous avez l’impression de ne plus ressentir votre faim correctement, de manger “par automatisme” ou de confondre faim et envie de manger, cet article est pour vous.

Avec les années, de nombreux facteurs peuvent perturber nos sensations alimentaires :

1. Les repas irréguliers

Quand on mange à des horaires changeants ou qu’on saute des repas, le corps perd ses repères. Il finit par déclencher des signaux de faim… par à-coups.

2. Les régimes restrictifs

Supprimer des aliments, réduire les portions, “tenir jusqu’au soir” : toutes ces pratiques dérèglent les sensations de faim et augmentent les envies de manger impulsives.

3. Le stress et la charge mentale

Un cerveau préoccupé se déconnecte du corps. Résultat : on oublie de manger, on grignote machinalement ou on confond les émotions avec la faim.

4. Les prises alimentaires automatiques

Manger devant un écran, dans la voiture ou sur le coin du bureau empêche d’écouter les signaux internes. Avec le temps, on finit par “déprogrammer” la faim naturelle.

5. L’ennui ou la fatigue

Le manque de sommeil ou l’ennui peuvent créer une fausse sensation de faim, souvent soudainement, surtout en fin de journée.

Distinguer les différentes formes de faim permet d’adapter sa réponse au bon besoin.

1. La faim physiologique

C’est la “vraie” faim, celle qui signale que le corps a besoin d’énergie.

Elle apparaît progressivement avec :

  • un léger creux à l’estomac,
  • une baisse d’énergie,
  • parfois des gargouillis,
  • une petite irritabilité ou une baisse de concentration.

2. La faim émotionnelle

Elle survient brusquement, sans signaux physiques.

Elle répond davantage à un besoin de réconfort qu’à un besoin nutritionnel.

Souvent liée à : stress, tristesse, solitude, ennui, anxiété.

3. La faim sensorielle

C’est l’envie qui apparaît parce qu’un aliment “donne envie” : une bonne odeur, un visuel appétissant, un souvenir associé.

Elle est normale : elle fait partie du plaisir de manger.

4. La faim cognitive

Dictée par des règles ou croyances « il faut finir son assiette », « il est midi, donc je dois manger ».

Elle reflète le poids des habitudes et de l’éducation alimentaire.

5. La faim cellulaire

Plus subtile, elle correspond aux besoins spécifiques du corps en nutriments (par exemple, envie de fruits après une période de repas riches). Elle traduit une recherche d’équilibre.

Pour vous aider, vous pouvez utiliser une échelle de la faim allant de 1 à 10.

L’idée est d’arriver à table quand la faim est modérée, autour de 3–4 :

  • Assez présents pour donner envie de manger
  • Pas trop forts pour éviter la précipitation

Votre faim n’est pas une urgence : elle monte progressivement.

Plus vous vous reconnecterez à vos sensations, plus elle deviendra lisible.

Certaines habitudes, souvent adoptées sans s’en rendre compte, entretiennent une sensation de faim incohérente :

1. Faire des repas trop légers

Un repas insuffisant provoque un retour de faim rapide.

Résultat : grignotages, frustrations, pertes d’énergie.

2. Sauter le petit-déjeuner “pour manger moins”

Le corps compense toujours plus tard : envie de sucre, féculents, gras.

3. Avoir peur des féculents ou des matières grasses

Ils rassasient durablement.

Sans eux, la faim revient en flèche.

4. Manger “trop tard”

Attendre la faim extrême pousse au manger vite et trop.

5. Grignoter à la place d’un vrai repas

Les prises répétées sans structure n’apportent ni satiété, ni satisfaction.

La reconnexion aux sensations alimentaires est un apprentissage progressif. Voici des pistes concrètes :

1. Manger des repas complets et suffisants

Protéines + féculents + légumes + matières grasses = satiété durable.

2. Créer une routine alimentaire régulière

Le corps adore la stabilité.

Des horaires approximatifs mais constants suffisent.

3. Manger dans un environnement calme autant que possible

Sans écran, sans distraction : juste vous et votre assiette, même 10 minutes.

4. Accueillir la faim sans peur

Un léger creux n’est pas un danger : c’est un simple message.

5. Tenir un mini-journal alimentaire sensoriel

Notez :

  • votre niveau de faim avant et après le repas
  • vos sensations
  • votre satisfaction
  • c’est un excellent outil pour se reconnecter à soi.

6. Distinguer “envie de manger” et “besoin de manger”

Les deux sont légitimes, mais ils n’ont pas la même fonction.

Parfois, la sensation est confuse. Voici une petite méthode simple :

  • Boire un verre d’eau et attendre 10 minutes: parfois, la fatigue ou la déshydratation faussent la sensation.
  • Se demander : “De quoi ai-je vraiment besoin ?” Energie ? Réconfort ? Pause ? Saveur ?
  • Si c’est une vraie faim : préparez une collation complète (féculent + protéine + fruit ou laitage).
  • Si c’est plutôt une envie : autorisez-vous un aliment plaisir, en pleine conscience, sans culpabilité.

La faim n’est pas un manque de contrôle : c’est un message.

Apprendre à l’écouter, c’est retrouver de la sérénité dans son alimentation, éviter les grignotages impulsifs, et construire des habitudes durables.

Avec du temps et de la bienveillance envers vous-même, ce dialogue avec votre corps redevient naturel — et profondément libérateur.